mardi 15 novembre 2011

Trop beau pour être vrai !



« Je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquis. »

Cette citation, que l’on attribue à Thomas Jefferson, troisième président des USA, et qui reprend des lignes qu’il aurait écrites soit en 1802 dans une lettre au Secrétaire d’Etat au Trésor Albert Gallatin, soit plus tard en 1809, dans "The Debate Over the Recharter of the Bank Bill », fait actuellement fureur sur internet (exemple ici). On en trouve plusieurs variantes en anglais et en français.

 A sa lecture, on est frappé par l’esprit visionnaire de ce président américain, tant elle semble coller parfaitement à la situation actuelle, plus de deux siècles plus tard.


Pourtant, une recherche effectuée sur le site officiel de la Fondation Thomas Jefferson, monticello.org, démontre que cette citation est un faux ! Lire The Jefferson Encyclopedia.

Elle serait apparue pour la première fois sous forme imprimée en 1937, donc peu après la crise économique de 1929, et la crise actuelle a évidemment favorisé sa résurgence.

Même si on peut regretter qu’elle ne soit pas authentique, car elle traduit un certain bon sens collectif des peuples qui sentent bien quels peuvent être les dangers d’un trop grand pouvoir laissé aux banques et au monde financier, cette citation n’en demeure pas moins une contrefaçon. L’honnêteté intellectuelle exige donc qu’on ne l’utilise pas pour soutenir une opinion ou une prise de position. On ne peut pas « mettre dans son camp » et appeler ainsi à la rescousse de ses propres idées un personnage historique illustre en lui prêtant des mots qui n’ont jamais été les siens.


On a aussi attribué à Thomas Jefferson cette très belle phrase qui fait l’apologie de l’amitié entre les Etats-Unis et la France : "Tout homme a deux pays : le sien et la France", mais ils n’ont jamais été trouvés dans les écrits de Jefferson !

Ces exemples montrent l’importance de la vérification des sources, surtout avant d’utiliser une citation qui fait le buzz sur internet.

                                                                               François Descheemaekere

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