mercredi 9 novembre 2011

Crise : à contre-courant des idées dominantes

J’ai sélectionné aujourd’hui, entre autres, 2 articles écrits par des professeurs d’économie renommés qui vont à contre-courant des idées dominantes et du « politiquement correct ». L’un s’attaque à la politique d’austérité qui vient d’être adoptée par la France, l’autre fait porter en grande partie la responsabilité de la crise de la zone euro à la Banque Centrale Européenne et à son ancien gouverneur M. Trichet.

Auteur de l’agence intellectuelle Telos, Charles Wyplosz, Professeur d'économie à l’Institut de Hautes Etudes Internationales et du Développement (Genève) s’attaque au deuxième plan d’austérité que vient d’adopter le gouvernement français. Il considère ce plan comme « un contresens économique dramatique » et pense que si « tout le monde à Paris semble convaincu que c’est le prix à payer pour éviter de perdre le AAA. C’est en fait le meilleur moyen d’y arriver. » Angoissés par la crise, les consommateurs réduisent leurs dépenses, et au lieu de les réconforter, le gouvernement fait exactement l’inverse en accroissant la pression fiscale. Le cercle vicieux est enclenché : « par rapport aux prévisions, la récession sera plus dure, les rentrées fiscales seront plus basses, les dépenses publiques (allocations de chômage et aides diverses) seront plus élevées et le déficit ne va pas diminuer, bien au contraire. »
Charles Wyplosz redoute un effet de contagion qui, de la Grèce, affecterait le Portugal et l’Italie, voire l’Espagne, causant la faillite des banques françaises très exposées à la dette de ces pays.
Pour lui, la logique dominante du moment qui part de la prémisse « il faut sauver le triple AAA » est un contresens.
Selon cette logique, le gouvernement veut montrer aux marchés financiers – et donc aux agences de notation – que nous sommes des purs et durs, presque des Allemands et qu’on va couper dans les dépenses et augmenter les impôts, alors que c’est exactement le contraire qu’il faudrait faire pour éviter la récession et pour rassurer les marchés financiers ! Car ces derniers, inquiets de ce cercle vicieux, apprécieraient que le gouvernement remonte le moral des ménages en réduisant la pression fiscale, ce qui relancerait l’économie en garantissant que les déficits et la dette diminueraient dès la reprise venue… et nous permettrait de conserver le fameux AAA !

Il conclut : « la poursuite de la politique d’austérité va à l’encontre de ce que les marchés financiers réclament : un retour rapide de la croissance. Le refus de prendre des engagements budgétaires permanents est exactement ce qui inquiète les marchés. Le risque d’effondrement des banques va peser de plus en plus lourdement sur la notation de la France. La perte du AAA est en train de devenir inéluctable. »

Dans le New York Times, John Quiggin, professeur visitant à Johns Hopkins University, met en cause la responsabilité de la BCE (Banque Centrale Européenne) et de son ancien gouverneur, M. Trichet, dans la crise de l’euro.
La crise actuelle montre l'impossibilité de gérer une politique macroéconomique commune dans un système où les décisions requièrent l'accord des 27 Etats membres, y compris les 17 qui partagent la monnaie commune, et dans une zone non homogène constituée de  pays différents qui ont des modèles de croissance et de consommation différents et des cycles économiques différents.
Ces problèmes sont certes réels, mais ils ne sont pas la cause de la défaillance systémique du système financier européen. Pour l’essentiel, cet échec a été causé par les choix politiques de l'une des rares institutions européennes qui a la capacité d'agir unilatéralement et de manière décisive: la Banque centrale européenne.
M. Trichet a eu une vision trop étroite du rôle de la BCE en étant obnubilé par l’objectif de stabilité des prix, au détriment de la gestion du système financier européen et de la viabilité de l’euro.
Si le successeur de M. Trichet, M. Draghi, suit la même politique en cherchant à tout prix à contenir l’inflation, ce sera finalement la destruction de l’euro…


                                          François Descheemaekere
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